Or, phosphate, zircon… Pour le Sénégal, des minerais vraiment stratégiques ?
L’or caracole en tête des produits les plus rentables et exportés du pays, selon le dernier rapport de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives du Sénégal (Itie). Mais l’exploitation du pétrole et du gaz devrait changer la donne dans les années à venir.
Dans un rapport publié le 21 décembre dernier, l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives du Sénégal (Itie) livre les chiffres clés de la contribution des industries extractives dans l’économie du pays en 2022. On y apprend notamment que les revenus générés par le secteur extractif étaient de 275 milliards de francs CFA (420 millions d’euros), soit une hausse de 42,5 milliards de F CFA par rapport à 2021. Au total, 242 millions de F CFA ont été affectés au budget de l’État (6000 milliards de FCFA en 2022).
Le rapport met également en exergue la contribution du secteur extractif dans l’économie. Il compte ainsi pour 32,16 % des exportations et pèse 4,5 % du PIB national, sans compter une part de 6,85 % dans les recettes de l’État. Au total, les 26 entreprises qui ont participé à l’étude ont déclaré employer 8 977 personnes, dont 95,2 % sont des nationaux.
Mais pour des observateurs de la société civile, les données publiées par l’Itie – qui fêtait ses dix ans d’existence au Sénégal – sont difficilement exploitables, faute de commentaires. Ils pointent également des retombées insuffisantes pour les populations locales. En voici les points saillants.
L’or, la locomotive du secteur
Porté par deux multinationales opérant à Kédougou – l’australien Resolute mining et l’anglo-canadien Endeavour –, le secteur de l’or constitue la locomotive des industries extractives. En 2022, environ 15 tonnes de ce métal précieux ont été extraites puis exportées en Suisse et en Australie, pour une valeur à la commercialisation estimée à presque 540 milliards de F CFA (environ 823 millions d’euros). Un chiffre qui ne prend pas en compte l’exploitation artisanale de l’or dans la région de Kédougou, autour de laquelle gravitent des milliers de personnes.
« Les sociétés ne touchent qu’environ 20 % de ces bénéfices, car les coûts de production sont importants, avec des montages financiers complexes », indique un spécialiste de la prospection minière, selon qui les chiffres données par l’Itie sont fiables : « Les entreprises n’ont aucun intérêt à tricher là-dessus, on trouve les mêmes chiffres dans leurs rapports annuels. »
Parmi les produits à forte valeur commerciale – du fait de leur volume ou de leur valeur sur le marché international – on trouve ensuite, dans l’ordre, le ciment, le clinker, l’ilménite 54, le phosphate ou encore le zircon premium. “Ce rapport vient conforter le fait que le secteur a un rôle important dans le développement de ce pays, ce sont des chiffres vérifiés, vérifiables et officiels”, estime Ousmane Mbaye, DG du groupe cimentier Dangote au Sénégal et président de la Chambre des mines du Sénégal.
• La future manne des hydrocarbures
En 2022, le secteur des hydrocarbures n’a représenté que 8,97 % des revenus du secteur extractif, pour un montant s’établissant à 42,7 milliards de F CFA. “L’entrée en exploitation des gisements pétroliers et gaziers va faire exploser ces chiffres dans les années à venir”, anticipe Ousmane Mbaye.
Une manne dont le secteur minier devrait également bénéficier. “L’une des difficultés des sociétés minières réside dans le coût de l’énergie, qui dépend de facteurs externes, comme les conséquences de la guerre en Ukraine. À terme, l’exploitation du pétrole et du gaz dans le pays va leur permettre de baisser leurs coûts de production et ainsi de gagner en rentabilité. Les retombées seront importantes également pour les communautés”, avance le président de la Chambre des mines.